La représentation des sorcières dans l’art
Qu'une histoire de balais et de grimoires ?
La sorcellerie et les sorcières sont un sujet largement employé en histoire de l’art. Si des œuvres font déjà mention de magie dans l’Antiquité, la première représentation d’une « sorcière », dans les termes que nous connaissons aujourd’hui, daterait en réalité de la fin du Moyen-Âge, qui signe d’ailleurs le début des chasses aux sorcières (et qui battent leur plein durant la Renaissance).
Les attributs de la sorcière
Deux images bien différentes des sorcières cohabitent dans l’art : l’une d’une femme vieille et volontairement laide, et l’autre d’une femme jeune, séductrice et cruelle. Nues ou vêtues comme des paysannes, on leur reproche volontiers leurs mœurs dévoyées. Rattachées au Diable, dont elles seraient « les putains », les sorcières auraient des attributs sataniques reconnaissables : elles chevaucheraient des boucs (personnification animale de Satan) ou des balais (symbole ouvertement phallique), s’habilleraient de noir (couleur du deuil) à partir du XVIIIe siècle, ou encore s’entoureraient d’animaux eux aussi noirs, comme le chat par exemple, ou encore de chaudrons, grimoires, et autres crânes…
« Quelle puissance que celle de la bien-aimée de Satan, qui guérit, prédit, devine, évoque les âmes des morts, qui peut vous jeter un sort […]. »
Jules Michelet, La Sorcière, 1862
Le sabbat
Le sabbat est la réunion des sorcières autour du Diable. Signifiant aussi « synagogue », le sabbat aurait été créé pour marginaliser les sorcières, tout comme les personnes juives. On doit d’ailleurs le chapeau pointu et le nez crochu à cette croyance très antisémite.
Lors des scènes de sabbat, les sorcières feraient notamment des sacrifices de nourrissons, symboles de pureté par excellence, au Diable. Dans ses œuvres terribles de sabbat, Francisco de Goya dénoncerait en réalité ces croyances et la pratique des chasses aux sorcières. En effet, si l’Inquisition espagnole est encore d’actualité à l’époque du peintre, Goya se souvient surtout du plus grand procès en sorcellerie d’Europe, au Pays basque en 1609, où plus de 7000 personnes furent suspectées.
Circé, tentatrice ?
Circé est sans doute LE symbole de la sorcière – femme fatale dangereuse. Dans la mythologie grecque, la magicienne vit seule sur son île quand Ulysse et ses compagnons y accostent. Avec un philtre, elle les aurait alors transformés (à l’exception d’Ulysse) en cochons. Après un an de détention, où Ulysse devient son amant et avec qui elle aura un enfant, elle leur rend forme humaine et ils reprennent la mer.
Sur cette peinture de John William Waterhouse, Circé, les cheveux lâchés, auburn, est seulement habillée d’une sorte de voile transparent, érotisant la magicienne. Assise sur un trône, l’air dominant, elle surplombe Ulysse (que l’on peut apercevoir dans le miroir derrière elle), et lui tend une potion d’une main, en tenant de l’autre une sorte de baguette en bois.
« Là, elle répand le liquide, extrait d’une racine vénéneuse, et, de sa voix de magicienne, elle murmure neuf fois une formule obscure, faite d’assemblage de mots inconnus »
Ovide, Métamorphoses, livre XIV, vers 56-58
Ailleurs dans le monde
Le Japon a ses propres croyances en matière de sorcellerie. Dans cette estampe, Utagawa Kuniyoshi représente la célèbre princesse et redoutable sorcière Takiyasha. Alors que son père (seigneur provincial) est tué pour avoir tenté de se soulever contre le pouvoir impérial de Kyoto, Takiyasha continue de vivre dans le palais en ruines. On la voit ici tenant un rouleau où elle y lit ses sortilèges. Elle fait apparaître un squelette géant pour faire fuir les deux guerriers envoyés par Kyoto pour détruire son pouvoir.
Dans l’art plus contemporain, des représentations associées à la sorcellerie, l’occultisme et le mysticisme ont revu le jour. C’est notamment le cas de l’artiste Hilma Af Klint. Pionnière de l’art abstrait (des années avant les grands maîtres du genre comme Kandinsky ou Klee), elle participait à des séances de spiritisme dans un groupe appelé « Les Cinq ». Ses œuvres mystiques seraient ainsi les représentations de ses interactions spirituelles. Elle peint notamment à partir de 1904 une série consacrée au temple, dont le monde des esprits l’aurait missionnée.
Ces dernières décennies, des mouvements féministes occidentaux se sont réapproprié le terme de « sorcières », symbole du pouvoir féminin en lutte contre le patriarcat.
Rappelons qu’en Occident, on dénombre environ 100 000 victimes des chasses aux sorcières, dont l’écrasante majorité serait des femmes, entre 75 et 90% des cas en fonction des régions (les chasses aux sorcières s’essoufflent à la toute fin du XVIIe siècle, mais la dernière victime daterait en réalité du XIXe siècle).
Mais chez Muzéo, que vous soyez en balai, ou bien à pied, vous êtes les bienvenu.e.s !
La sorcellerie et les sorcières sont un sujet largement employé en histoire de l’art. Si des œuvres font déjà mention de magie dans l’Antiquité, la première représentation d’une « sorcière », dans les termes que nous connaissons aujourd’hui, daterait en réalité de la fin du Moyen-Âge, qui signe d’ailleurs le début des chasses aux sorcières (et qui battent leur plein durant la Renaissance).
Les attributs de la sorcière
Deux images bien différentes des sorcières cohabitent dans l’art : l’une d’une femme vieille et volontairement laide, et l’autre d’une femme jeune, séductrice et cruelle. Nues ou vêtues comme des paysannes, on leur reproche volontiers leurs mœurs dévoyées. Rattachées au Diable, dont elles seraient « les putains », les sorcières auraient des attributs sataniques reconnaissables : elles chevaucheraient des boucs (personnification animale de Satan) ou des balais (symbole ouvertement phallique), s’habilleraient de noir (couleur du deuil) à partir du XVIIIe siècle, ou encore s’entoureraient d’animaux eux aussi noirs, comme le chat par exemple, ou encore de chaudrons, grimoires, et autres crânes…
« Quelle puissance que celle de la bien-aimée de Satan, qui guérit, prédit, devine, évoque les âmes des morts, qui peut vous jeter un sort […]. »
Jules Michelet, La Sorcière, 1862
Le sabbat
Le sabbat est la réunion des sorcières autour du Diable. Signifiant aussi « synagogue », le sabbat aurait été créé pour marginaliser les sorcières, tout comme les personnes juives. On doit d’ailleurs le chapeau pointu et le nez crochu à cette croyance très antisémite.
Lors des scènes de sabbat, les sorcières feraient notamment des sacrifices de nourrissons, symboles de pureté par excellence, au Diable. Dans ses œuvres terribles de sabbat, Francisco de Goya dénoncerait en réalité ces croyances et la pratique des chasses aux sorcières. En effet, si l’Inquisition espagnole est encore d’actualité à l’époque du peintre, Goya se souvient surtout du plus grand procès en sorcellerie d’Europe, au Pays basque en 1609, où plus de 7000 personnes furent suspectées.
Circé, tentatrice ?
Circé est sans doute LE symbole de la sorcière – femme fatale dangereuse. Dans la mythologie grecque, la magicienne vit seule sur son île quand Ulysse et ses compagnons y accostent. Avec un philtre, elle les aurait alors transformés (à l’exception d’Ulysse) en cochons. Après un an de détention, où Ulysse devient son amant et avec qui elle aura un enfant, elle leur rend forme humaine et ils reprennent la mer.
Sur cette peinture de John William Waterhouse, Circé, les cheveux lâchés, auburn, est seulement habillée d’une sorte de voile transparent, érotisant la magicienne. Assise sur un trône, l’air dominant, elle surplombe Ulysse (que l’on peut apercevoir dans le miroir derrière elle), et lui tend une potion d’une main, en tenant de l’autre une sorte de baguette en bois.
« Là, elle répand le liquide, extrait d’une racine vénéneuse, et, de sa voix de magicienne, elle murmure neuf fois une formule obscure, faite d’assemblage de mots inconnus »
Ovide, Métamorphoses, livre XIV, vers 56-58
Ailleurs dans le monde
Le Japon a ses propres croyances en matière de sorcellerie. Dans cette estampe, Utagawa Kuniyoshi représente la célèbre princesse et redoutable sorcière Takiyasha. Alors que son père (seigneur provincial) est tué pour avoir tenté de se soulever contre le pouvoir impérial de Kyoto, Takiyasha continue de vivre dans le palais en ruines. On la voit ici tenant un rouleau où elle y lit ses sortilèges. Elle fait apparaître un squelette géant pour faire fuir les deux guerriers envoyés par Kyoto pour détruire son pouvoir.
Dans l’art plus contemporain, des représentations associées à la sorcellerie, l’occultisme et le mysticisme ont revu le jour. C’est notamment le cas de l’artiste Hilma Af Klint. Pionnière de l’art abstrait (des années avant les grands maîtres du genre comme Kandinsky ou Klee), elle participait à des séances de spiritisme dans un groupe appelé « Les Cinq ». Ses œuvres mystiques seraient ainsi les représentations de ses interactions spirituelles. Elle peint notamment à partir de 1904 une série consacrée au temple, dont le monde des esprits l’aurait missionnée.
Ces dernières décennies, des mouvements féministes occidentaux se sont réapproprié le terme de « sorcières », symbole du pouvoir féminin en lutte contre le patriarcat.
Rappelons qu’en Occident, on dénombre environ 100 000 victimes des chasses aux sorcières, dont l’écrasante majorité serait des femmes, entre 75 et 90% des cas en fonction des régions (les chasses aux sorcières s’essoufflent à la toute fin du XVIIe siècle, mais la dernière victime daterait en réalité du XIXe siècle).
Mais chez Muzéo, que vous soyez en balai, ou bien à pied, vous êtes les bienvenu.e.s !